Historique de l’Alcaptonurie
En 1902, le physicien britannique Archibald Garrod, médecin spécialisé dans ce que l’on appelle aujourd’hui la médecine métabolique, a décrit l’Alcaptonurie (AKU) en tant que maladie héréditaire.
Le Dr Archibald Garrod a été un véritable pionnier. Après avoir traité plusieurs patients atteints de l’Alcaptonurie et examiné leurs antécédents familiaux, il a réalisé que la maladie suivait des schémas spécifiques. Il a observé que les frères et sœurs des patients étaient souvent atteints également. Et, que de plus, la maladie était plus répandue chez les enfants de mariages consanguins. Il s’est donc rendu compte que l’AKU était en quelque sorte héréditaire.
Le Dr Archibald Garrod savait que l’Alcaptonurie était causée par une erreur chimique (maintenant connue sous le nom d’Acide HomoGentisique, AHG), qu’il qualifiait d’« erreur innée du métabolisme ». Alors qu’il enquêtait sur les mystères de l’AKU, il devint ami avec William Bateson, un scientifique de Cambridge qui s’intéressait au travail de Gregor Mendel, le moine célèbre pour ses premières expériences avec la génétique des petits pois. Bateson a réalisé que l’erreur innée du métabolisme de l’AKU avait en fait un caractère récessif mendélien. La maladie est donc causée par une erreur héritable et selon un schéma prévisible.
Au début du 20ème siècle, les notions de la génétique et du patrimoine génétique commençaient seulement à se former. La découverte de l’ADN aura lieu seulement 50 ans plus tard, donc il y avait peu de compréhension des maladies héréditaires. Les travaux de Garrod et Bateson ont montré qu’une maladie pouvait être héréditaire et était déterminée par des règles biochimiques. Cela a contribué à développer l’idée d’une maladie génétique, et à donner à l’Alcaptonurie sa réputation de première maladie génétique découverte.
En 1908, lors d’une conférence à la Royal Society à Londres, le Dr Garrod a présenté l’AKU, ainsi que trois autres maladies héréditaires (Albinisme, Cystinurie et Pentosurie). C’est là que le terme «erreur innée du métabolisme» est devenu connu. Cela a conduit à la création d’une société médicale en 1963: la Société pour les études des erreurs innées du métabolisme (SSIEM).
William Bateson, quant à lui, a contribué à la création de la génétique moderne. Il est crédité d’avoir créé le mot «génétique» et les termes «hétérozygote», «homozygote» et «allèle». En 1910, il a fondé un journal pour aider à expliquer ce nouveau phénomène de la science, appelé le Journal de la Génétique.
Suite à l’importance de ses recherches sur l’Alcaptonurie et d’autres maladies rares, le Dr Garrod a fait remarquer que : «L’étude des expériences de la nature a une valeur particulièrement remarquable; beaucoup de leçons que les maladies rares peuvent nous enseigner pourraient difficilement être apprises autrement. ”
Résumé de l’histoire de la recherche sur l’Alcaptonurie
1500 av. J-C | Première preuve de l’existence de l’Alcaptonurie chez la momie Égyptienne appelée Harwa. |
1584 ap. J-C | Scribonius, médecin allemand, observe le noircissement de l’urine chez un patient lorsque l’urine est laissée à l’air. |
1859 | Baedeker met le nom « alcapton » sur le produit chimique qui assombrit l’urine et appelle la maladie « Alcaptonurie ». |
1866 | Virchow décrit la pigmentation observée dans les cartilages des patients et appelle le processus « ochronose ». |
1902 | Garrod décrit l’Alcaptonurie en tant que maladie héréditaire. |
1908 | Garrod définit l’erreur innée de métabolisme en utilisant l’exemple de l’Alcaptonurie. |
1958 | La Du montre que la maladie est causée par un manque d’enzyme, appelé l’Acide HomoGentisate 1,2-dioxygénase. |
1993 | Pollak cartographie l’emplacement de la mutation sur le chromosome trois. |
1994 | Montagutelli montre que certaines souris développent naturellement l’Alcaptonurie. |
2003 | Le patient Bob Gregory et le Dr Ranganath fondent l’« AKU Society » à Liverpool, à laquelle se joint le Dr Nicolas Sireau. |
2006 | Les grands-parents Sireau fondent l’ALCAP en France, l’association jumelle de l’« AKU Society ». |
2009 | Les Instituts Nationaux de la Santé aux États-Unis (NIH) concluent un essai clinique infructueux portant sur l’administration de la Nitisinone chez les patients atteints d’Alcaptonurie (les résultats ont été publiés en 2010). |
2011 | Résultats de la première campagne d’identification coordonnée des patients atteints d’Alcaptonurie au Royaume-Uni. |
2011 | Taylor et ses collègues démontrent l’ampleur de la progression de la pigmentation des cartilages chez des patients atteints d’Alcaptonurie. |
2012 | Commencement des essais cliniques « DevelopAKUre » visant à réévaluer les effets de la Nitisinone chez les patients atteints d’Alcaptonurie. |
2012 | Fondation du Centre National AKU à Liverpool, Royaume-Uni. |
2012 | Taylor prouve que l’Alcaptonurie chez les souris est la même maladie que chez les humains. |
2013 | Preston montre que l’Alcaptonurie chez les souris peut être traitée par la Nitisinone. |
2013 | Fin de la première étude « DevelopAKUre », appelée SONIA 1 ; les résultats confirment que la Nitisinone fait baisser l’AHG et confirment la dose correcte pour les études à venir. Les résultats ont été publiés en 2015. |
2014 | Début de la deuxième étude « DevelopAKUre », appelée SONIA 2 visant à comparer les effets de la Nitisinone versus un non-traitement. |
2018 | Publication des résultats des études d’observations menées au Royaume-Uni par le groupe du Pr Ranganath. L’étude montre pour la première fois que la Nitisinone arrête l’Ochronose et ralentit la progression de l’Alcaptonurie. |
2019 | Fin de l’essai clinique SONIA 2. |